La culture rapporte plus que la Mercedes Benz
Cinquième
secteur économique français, la culture pèse plus lourd que le luxe,
l'automobile ou les télécommunications, révèle une étude qui détaille le poids
de ses 9 familles dans une version très élargie.
Musique, théâtre, cinéma, livres mais également
télévision, radio, presse, arts plastiques et visuels et jeux vidéo. Prise au
sens large, la culture et la création pèsent aujourd’hui plus en France que
l’automobile ou le luxe, selon une étude publiée jeudi. Le chiffre d’affaires
direct des industries culturelles et créatives (ICC) en France est de 61,4
milliards d’euros contre 60,4 milliards pour l’automobile et 52,5 pour le luxe,
selon l’étude réalisée par le cabinet
EY (ex-Ernst&Young) qui se base sur des données 2011. Les «ICC»
emploient 1,2 million de personnes soit 5% de l’emploi intérieur total, «des emplois qualifiés comme non
qualifiés, qui attirent notamment les jeunes».
Elles ont généré un chiffre d’affaires total de 74,6 milliards d’euros, si l’on
ajoute celui généré par les activités indirectes (20% de l’ensemble).
Le «Panorama économique des industries culturelles et
créatives» (ICC), premier du genre, a été réalisé à l’initiative de «France
créative», nouvelle plateforme regroupant les acteurs des industries
culturelles et créatives (Adami, Snep et Sacem pour la musique, Procirep pour
le cinéma et la télévision, Fesac pour le spectacle vivant, etc.). Ils
entendent promouvoir un discours positif sur la culture à destination du grand
public et des décideurs, mais aussi peser de tout leur poids face aux géants du
numérique, les Google, Apple, Facebook, Amazon et consorts. L’étude, préfacée
notamment par huit anciens ministres de la Culture et l’actuelle Aurélie
Filippetti, doit être présentée prochainement à l’Elysée et à Matignon.
TORDRE LE COU
AUX IDÉES REÇUES
Un Français consacre en moyenne 9 heures par jour,
week-end compris, à regarder la télévision, écouter de la musique, aller au
spectacle, jouer à des jeux vidéo, lire, etc., relève EY. En 2011, les
dépenses culturelles et de loisirs représentaient 8,4% des dépenses de
consommation des ménages et 4% du PIB, plaçant la France au 2e rang des pays du
G8 derrière les Etats-Unis.
L’objectif de l’étude est d’abord pédagogique: faire
connaître la réalité économique des secteurs culturels, mais aussi tordre le
cou à certaines idées reçues en France et à Bruxelles, selon lesquelles la
culture est uniquement «un
gouffre à financements et subventions publics», selon un connaisseur du dossier. «Les industries culturelles, peut-on lire sur le site «France Creative», sont une partie de la solution au défi
national de la croissance et de l’emploi».
Secteur par secteur, les arts graphiques et plastiques (musées, galeries,
ventes d’art, design, architectes et décorateurs, etc.) arrivent en tête
avec 19,8 milliards de chiffre d’affaires direct et connexe mais aussi en terme
d’emplois (307.716). La télévision pèse 14,9 milliards d’euros et 176.467
emplois, la musique 8,6 milliards et 240.874 emplois, le spectacle vivant
(théâtre, danse, opéra, spectacles musicaux, etc.) 8,4 milliards et
267.713 emplois, les jeux vidéo 5 milliards et 23.635 emplois ou encore le
cinéma 4,4 milliards et 105.890 emplois.
DES LEADERS
MONDIAUX BLEU-BLANC-ROUGE
L’étude relève encore que malgré la crise, le taux
d’emploi en Europe des ICC a grimpé de 3,5% en moyenne par an entre 2000 et
2007. EY souligne encore leur rayonnement mondial avec des entreprises leaders
comme Universal Music Group (filiale de Vivendi), Deezer, Hachette, tandis que
le cinéma est le 2e exportateur mondial derrière les Etats-Unis et que le jeu
vidéo réalise 80% de ses ventes à l’export. La France possède également le
deuxième répertoire musical le plus diffusé au monde. «Les industries culturelles sont
un secteur varié, dont les entreprises vont des grands groupes mondiaux comme
Hachette aux autoentrepreneurs»,
souligne Jean-Noël Tronc, directeur général de la Sacem. Il y a des secteurs ignorés, comme
la fabrication d’instruments de musique - filière championne d’ailleurs à
l’export - ou les discothèques qui pèsent à eux deux près d’un milliard
d’euros», ajoute-t-il. «Quand on nous parle
d’excellence, on avance en général la pharmacie, l’aéronautique, le luxe, le
tourisme, mais on cite rarement la culture, pourtant l’un des rares secteurs à
avoir une balance commerciale positive»,
poursuit Marc Lhermitte, associé EY et auteur de l’étude. Une des explications
tient aussi au fait que les ICC «ont
intégré tôt les technologies numériques».
Face à une industrie en déclin, «l’économie
de la culture et de la création constitue,
dit-il, un
relais de croissance incontestable en pleine évolution et exportateur de valeurs
fortes pour la France».
UN NOUVEL OUTIL
D’INFLUENCE POUR LE «SOFT POWER» CULTUREL FRANÇAIS
Ce panorama doit également servir à ce que ces
industries culturelles et créatives fassent mieux entendre leur voix auprès des
pouvoirs publics et surtout de la Commission de Bruxelles qui sera renouvelée
l’an prochain. Le débat récent sur l’inclusion ou non de l’exception culturelle
au menu des négociations entre l’Europe et les Etats-Unis sur le traité de
libre-échange ou encore le projet européen de communication cinéma ont mis en
lumière les menaces potentielles qui pèsent sur ces secteurs et les aides dont
ils bénéficient. Au-delà de la mise en valeur du poids économique de la culture
qu’apporte ce panorama, il doit maintenant servir à fédérer les acteurs de ses
différentes filières qui comptent bien ne pas en rester là et repasser à
l’offensive sitôt que la nouvelle Commission européenne aura pris ses quartiers
à Bruxelles à l’été prochain.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.