mardi 25 février 2014

mardi 25 février : il est rassurant de voir que, d'une manière ou d'une autre, les banques seront empêchées de faire de trop grosses bêtises !

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L'ambitieuse réforme des grandes banques européennes de Michel Barnier

Le Monde.fr |  • Mis à jour le 
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Michel Barnier, à Bruxelles le 26 juin 2013. | GEORGES GOBET/AFP
Michel Barnier, commissaire européen au marché intérieur et aux services financiers, a présenté, mercredi 29 janvier, son projet de réforme structurelle des grandes banques européennes. Ce texte, qui ne pourra être examiné avant les élections européennes de mai, et dont l'examen se fera sous la prochaine mandature de la Commission européenne, vise à limiter le risque dans la sphère bancaire, six ans après la crise de 2008. Il cible les trente plus gros établissements bancaires de l'Union européenne, dont la faillite déstabiliserait l'économie.
  • Que contient le projet de réforme bancaire de M. Barnier ?
Le projet Barnier s'organise autour de deux mesures phares. La première vise à interdire aux banques, dès 2017, de spéculer pour leur propre compte sur les produits financiers s'échangeant sur les marchés (actions, obligations, produits financiers complexes…) ainsi que sur les matières premières.
Cette proposition est directement inspirée de la réforme américaine Volcker (du nom de son auteur, l'ancien président de la Réserve fédérale américaine de 1979 à 1987, Paul Volcker). Le négoce de produits financiers, lorsqu'il n'est exercé qu'à des fins de profit, sans lien avec les clients, est dangereux, rappelle le commissaire européen. La spéculation sur matières premières entraîne des variations de prix affectant l'économie réelle et les populations.
La deuxième mesure du projet Barnier attribue aux autorités de contrôle du secteur bancaire le « pouvoir » d'imposer le cantonnement, dans une filiale séparée, d'autres activités de marché jugées à haut risque, réalisées pour leurs clients. Ce pouvoir se transforme en « obligation » de faire si les volumes de transactions en jeu deviennent trop importants. A ce titre, la question des seuils au-delà desquels la filialisation des activités de marché risquées deviendra obligatoire sera très importante.
  • Est-ce un projet ambitieux ?
Le projet Barnier est ambitieux dans sa forme actuelle. Tel qu'il est rédigé, il obligerait en effet les grandes banques, qui sont très actives sur les marchés financiers, à cantonner dans une filiale ad hoc un nombre important d'opérations. Ces opérations incluraient le négoce de produits dérivés complexes, une large part de leurs opérations de titrisation (la titrisation consiste à transformer des créances en produits financiers, pour les revendre), mais aussi leurs fameuses activités dites de « tenue de marché » (l'ensemble des transactions financières effectuées par les banques sur les marchés pour assurer la liquidité de ceux-ci et garantir aux investisseurs que les produits achetés pourront être revendus).
C'est pour cette raison que le texte, dont les premières moutures ont très vite circulé, a été attaqué par les lobbies financiers européens. Ceux-ci ont tenté d'en amoindrir la portée jusqu'au dernier moment. Ils ont fait circuler de multiples « notes blanches », censées alerter leurs gouvernements et les services de Bruxelles sur les dangers d'un tel projet, selon eux coûteux à mettre en place, contraignant en termes de capitaux propres et de garanties à mobiliser… donc susceptible d'amoindrir leurs marges de manœuvres financières et dangereux pour le financement de l'économie.
  • Certains pays n'ont pas attendu pour réformer leurs banques. Le projet Barnier est-il compatible ? Plus ou moins sévère ?
Le projet Barnier va plus loin que la quasi-totalité des réformes entreprises à ce jour en Europe par les pays membres de l'Union européenne (Belgique, France et Allemagne), Royaume-Uni excepté. Le texte du commissaire au marché intérieur et aux services financiers irrite donc ces pays, France et Allemagne en tête, qui vont tenter de s'y opposer. Il inquiète leurs banques, qui avaient réussi à convaincre leur gouvernement respectif d'adopter des réformes légères et quasiment indolores, en donnant la priorité au renforcement de la supervision bancaire.
En votant leurs lois bancaires avant Bruxelles, France et Allemagne avaient espéré donner le la. M. Barnier contrarie donc leurs espérances.
  • Que dit par exemple la réforme française ? En quoi est-elle moins ambitieuse que le projet Barnier ? Quelles seraient les conséquences de l'adoption du texte pour les banques françaises ?
Après d'âpres débats, la France a entériné une réforme a minima de la structure des banques (loi de séparation et de régulation des activités bancaires du 26 juillet 2013), préférant accroître les pouvoirs des autorités de surveillance des banques.
La loi française impose certes aux banques de filialiser certaines activités de marché risquées, mais le champ du cantonnement est très restreint. Au point que certaines banques pourraient décider de stopper ces activités plutôt que de créer une filiale.
S'il était adopté, le projet Barnier changerait donc fondamentalement la donne. En clair, il obligerait les grandes banques françaises, en premier lieu la BNP Paribas et la Société générale, à se réorganiser en profondeur, en créant une filiale ad hoc, avec à la clé des coûts en fonds propres substantiels.
  • Quid du Royaume-Uni, qui a adopté une réforme bancaire dite Vickers ?
M. Barnier prévoit d'exempter le Royaume-Uni de sa réforme, la réforme Vickers étant en effet jugée plus sévère (elle sépare la banque de dépôts de la banque de marchés). Une exemption que la France et l'Allemagne entendent déjà contester au nom de l'égalité de traitement.
  • Quels sont les arguments de la France pour contrer le projet Barnier ?
Le camp français ne s'attendait pas à un projet aussi tranché. Il est donc mobilisé contre une réforme jugée contraire à ses intérêts, mauvaise pour ses banques et nuisible à l'économie.
Banques et politiques sont prêts à faire campagne commune pour dénoncer un « mauvais projet ». Ils espèrent ranger Bruxelles à leur position, estimant que la France est parvenue, dans sa loi, à un point d'équilibre. Le ministre de l'économie et des finances, Pierre Moscovici, a déjà fait connaître son courroux à Michel Barnier .
« Nous sommes sur une proposition dure et contraignante de la Commission européenne, regrette Karine Berger, députée socialiste des Hautes-Alpes, secrétaire nationale du PS chargée des questions économiques et ex-rapporteur de la loi de séparation des activités bancaires. Et il n'est pas normal que le Royaume-Uni bénéficie d'une exemption ! Comment imaginer un texte de régulation bancaire qui ne s'appliquerait pas à la City ? »
« Les idées qui ont été mises sur la table par Michel Barnier sont des idées, je pèse mes mots, qui sont irresponsables et contraires aux intérêts de l'Union européenne », a déclaré Christian Noyer, gouverneur de la Banque de France, mercredi. Dans l'après-midi, M. Barnier rétorquait : « Je ne peux pas croire que Christian Noyer, qui est un homme compétent, ait pu faire ces déclarations en ayant pris connaissance du détail de nos propositions. » « Ce que nous faisons précisément, c'est de donner aux superviseurs le pouvoir d'imposer la filialisation de banques trop grosses pour faire faillite, trop complexes pour être résolues sans crise systémique et trop chères à sauver avec des fonds publics, lorsque ces banques prennent des risques excessifs », a-t-il expliqué.
Mardi 28 janvier, à la veille de la présentation du projet Barnier, la nouvelle directrice générale de la Fédération bancaire française, Marie-Anne Barbat-Layani, a estimé de son côté que ce texte créait « une certaine confusion » pour les banques françaises et allemandes, occupées à se conformer à leurs lois nationales.
Gérard Mestrallet, président de Paris Europlace, une association de défense de la place financière de Paris, a écrit à Michel Barnier, mardi, pour s'inquiéter d'une « menace sur la compétitivité du secteur bancaire européen et sa capacité à financer l'économie ».
De leur côté, le Medef et la Fédération des industriels allemands ont demandé à José Manuel Barroso, le président de la Commission, dans des courriers séparés, de modifier ou de reporter le projet de règlement, le temps de mener des consultations.
Par Anne Michel

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