lundi 12 mai 2014

mercredi 14 mai : Une expérience prometteuse d'«invisibilité sismique»

http://www.lefigaro.fr/sciences/2014/04/08/01008-20140408ARTFIG00365-une-experience-prometteuse-d-invisibilite-sismique.php

Une expérience prometteuse d'«invisibilité sismique»
Des chercheurs français ont réussi à «contrôler» des ondes sismiques en créant des hétérogénéites dans le sol qui permettent de les détourner.
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Peut-on rendre des bâtiments ou des villes «invisibles» aux tremblements de terre en forçant les ondes sismiques à les contourner? Cette idée, moins saugrenue qu'il n'y paraît, s'inspire de célèbres travaux sur la lumière réalisés par le physicien anglais John Pendry. Ce dernier avait démontré en 2006 qu'il était possible de créer un matériau sur lequel les rayons lumineux «glisseraient», ce qui le rendrait invisible. Sa théorie reposait essentiellement sur le caractère ondulatoire de la lumière. Or, mathématiquement, il n'y a pas vraiment de différence entre une onde de type électromagnétique et une onde mécanique (houle, séisme, etc.).
«Nous avons réalisé qu'en forant des trous ou en plaçant judicieusement des piliers dans le sol, il serait possible d'obtenir un effet similaire», explique Sébastien Guenneau, directeur de recherche du CNRS à l'Institut Fresnel de Marseille qui a imaginé ce concept de cape d'invisibilité sismique. «Il nous restait à vérifier que les simulations numériques et la théorie que nous proposions en 2009 tenaient la route.»

Contrôler les ondes sismiques

Stéphane Brûlé pour sa part, sismologue de formation et ingénieur BTP chez Ménard, tombe par hasard sur les travaux de ses collègues marseillais. Enthousiasmé par l'idée, il propose de monter une expérience de terrain afin de valider le concept. Le dispositif mis en place à Grenoble est assez lourd. Plusieurs dizaines de trous de 32 cm de diamètre et 5 m de profondeur sont creusés à intervalles réguliers dans un grand rectangle (un terrain de badminton). Des dizaines de capteurs sismiques sont alors disposés sur une zone un peu plus grande. Un vibreur, qui émet 50 vibrations par seconde (50 hertz), est enfoncé dans le sol devant l'installation.
Les résultats, publiés dans la revue Physical Review Letters, sont très encourageants: les ondes sismiques artificielles sont clairement détournées par les différents puits créant une «bande interdite». «Ce n'est qu'une preuve de concept, mais cela montre que des inhomogénéités artificielles dans le sol permettent de contrôler la propagation des ondes», se félicite Stéphane Brûlé.

Une invisibilité incomplète

Une autre expérience, menée à Lyon en 2012 - mais dont les résultats n'ont pas encore été publiés -, serait encore plus concluante. «Cette fois-ci, les trous étaient plus larges et disposés en arcs de cercle concentriques, raconte Sébastien Guenneau. C'est une configuration plus proche de ce que nous imaginons pour protéger des bâtiments.» C'est la chute d'un poids de plusieurs tonnes d'une hauteur de 20 mètres qui a simulé le séisme. «Les fréquences obtenues pour les ondes sismiques sont plus basses et plus proches de la réalité», souligne Stéphane Brûlé. La «cape antisismique» aurait parfaitement fonctionné.
Bien sûr, cette cape ne rend pas complètement invisible. «La Terre se soulève sous l'effet des ondes les plus longues, de taille kilométrique, rappelle Stéphane Brûlé. Celles-ci ne sont pas détournées, mais ce ne sont pas les plus dangereuses. En pratique, il faudra surtout protéger les bâtiments des fréquences avec lesquelles ils entrent en résonance. Généralement ce sont les ondes comprises entre 1 et 10 Hz.»
Une troisième expérience doit être menée fin 2014 dans une configuration quasi réelle afin de vérifier l'efficacité du dispositif pour l'intégralité de cette gamme de longueurs d'onde. Si cela fonctionne, les ingénieurs prendront le relais afin de trouver des applications concrètes. «Cela pourrait permettre de protéger des centrales nucléaires, des aéroports ou des bâtiments historiques pour lesquels il est compliqué de mettre en place des fondations antisismiques», note Sébastien Guenneau.
Le chercheur a réussi à se faire allouer 1,5 million d'euros sur 5 ans par le Conseil de recherche européen pour ses travaux. Il utilise une partie de cette enveloppe pour mettre au point des dispositifs antitsunamis fonctionnant sur le même principe. «Les installations de protection des digues sont déjà très encourageantes», estime-t-il.

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