La visibilité, une des clés du succès pour le jeu vidéo français
Alors qu'un rapport sénatorial propose la création d'une plateforme en ligne réservée aux jeux vidéo français, une offre promotionnelle, regroupant 17 titres créés en France, a fait bondir les ventes chez le leader du marché, Steam.
Plus de 600% d'augmentation des ventes en une semaine! Capital Games, le «cluster» qui regroupe les différents studios de jeux vidéo de la région parisienne, peut se frotter les mains:son opération «Games from Paris» est un vif succès. Durant une semaine, une quinzaine de titres produits en Ile-de-France était mise en avant à prix réduit sur la première plateforme mondiale d'achats de jeux vidéo en ligne, Steam. «Un bilan positif, qui témoigne des besoins en visibilité des productions de jeux vidéo dans un contexte international hyperconcurrentiel», estime Capital Games.
Au total, 50.000 unités ont été téléchargées en une semaine, pour un chiffre d'affaires de 450.000 euros. «Un des jeux a vu ses ventes augmenter de 5000%: son studio n'avait écoulé que 218 exemplaires durant la semaine précédant l'offre, contre plusieurs milliers durant l'opération», explique Pierre Daigre, chargé de mission chez Capital Games. Impossible de savoir qui est l'heureux élu, les studios préférant rester discrets sur cette question. Capital Games reconnaît cependant que l'offre a surtout bénéficié «à quelques titres en particulier», issus notamment des catalogues de Nadéo (Trackmania,Shootmania) ou Cyanide (Game of Thrones). «Le jeu de stratégie Wargame Airland Battle a également bénéficié de quelques articles dans la presse internationale à l'occasion de l'opération Steam, et cela a eu un grand impact sur ses ventes», ajoute Pierre Daigre. Au total, une trentaine d'articles dans la presse nationale et internationale ont relayé l'événement, «assurant une visibilité certaine aux studios participants».
Une mise en avant demandée dans un rapport sénatorial
Pour Capital Games, le bilan de cette opération est clair: pour exister, les jeux français «qui ne sont pas soutenus par un grand éditeur international, comme Ubisoft, ont besoin d'une mise en avant». Les sénateurs EELV et UMP André Gattolin et Bruno Retailleau sont arrivés aux mêmes conclusions dans leur rapport sur l'industrie française du jeu vidéo, remis la semaine dernière au Sénat. «On ne compte plus le nombre de petits jeux indépendants perdus dans les limbes de la distribution [en ligne]», peut-on y lire. Mais les élus proposent d'aller encore plus loin pour «rendre l'offre de produits français plus visible»: créer une plateforme de distribution française, «appuyée par les pouvoirs publics et ouverte à tous les jeux produits sur le territoire». En clair, un Steam 100% national.
Le succès de «Games from Paris» semble prouver que l'intuition des sénateurs est bonne. Cependant, Capital Games reste réservé sur l'opportunité de construire une plateforme nationale, alors que des acteurs internationaux sont déjà bien implantés et connus du public. «La vraie question serait “comment mettre en place une telle plateforme?”. Cela demanderait énormément de moyens techniques, financiers, et de communication», estime Pierre Daigre.
Le cluster pense qu'il faut plutôt multiplier les opérations sur les plateformes déjà bien établies. Mais cela serait-il possible? Pas sûr, à première vue. «Games from Paris» a pu naître grâce à une opportunité en or: la place d'invité d'honneur de la France à la Gamescom, salon international du jeu vidéo qui a eu lieu fin août à Cologne. Le prétexte était donc parfait pour vendre l'opération promotionnelle au géant américain Valve, qui décide lui-même quels jeux seront mis en avant sur la page d'accueil de son service Steam. Autre atout du dossier français: Capital Games s'est chargé de coordonner l'opération pour plusieurs éditeurs français, alors qu'il est d'usage sur Steam que chaque éditeur gère sa propre offre promotionnelle. Le cluster pense que c'est ce dernier élément qui devrait permettre une seconde édition de «Games from Paris», «Steam semblant satisfait» des résultats de cette opération «clés en main». Et de rêver, pourquoi pas, à une autre opération associant des studios provenant d'autres régions françaises.
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