lundi 6 janvier 2014

Mercredi 8 janvier : Etsy, le fait-main qui fait recette sur le Net

http://mobile.lemonde.fr/economie/article/2013/12/16/etsy-le-fait-main-qui-fait-recette-sur-le-net_3528693_3234.html

Etsy : le fait-main qui fait recette sur le Net

Etsy, le site de e-commerce, spécialisé dans les produits faits main et vintage, a franchi un record avec 1 milliard de dollars de chiffre d'affaires au troisième trimestre. | Etsy.com
Un bonnet en laine de Californie, de l'huile d'olive grecque ou une descente de lit made in Pakistan... La recette d'Etsy fonctionne plus que jamais. Le site de e-commerce, spécialisé dans les produits faits main et vintage, a franchi en octobre un record, avec plus d'un milliard de dollars de chiffre d'affaires – contre 895 millions de dollars en 2012.
Les chiffres parlent d'eux-mêmes : rentable depuis 2009, la plateforme de commerce en ligne a engendré depuis sa création en 2005 la vente de 100 millions de produits – sur lesquels il récupère 0,20 centimes de dollars par annonce et 3,5 % de la transaction. Le site compte désormais plus de 30 millions de membres, soit 10 millions de plus qu'en 2012. Hormis les particuliers, Etsy réunit aussi 1 million de boutiques actives et propose au total plus de 20 millions d'articles à la vente.
Pour le sociologue Eric Donfu, cet engouement pour des produits faits maison par des particuliers, fut-ce à l'autre bout de la planète, s'explique d'abord par le contexte économique actuel. « Comme le montre le Credoc, les ménages se sentent de plus en plus contraints financièrement, les conditions d'emploi sont de plus en plus précaires (...) et le sentiment de vivre dans un univers instable et insécurisant s'est accru », relève-t-il.
« UN CHANGEMENT DE MODÈLE DE CONSOMMATION EN COURS »
Dans ce contexte, la recherche de produits faits main « permet de retrouver ses racines, de marquer son appartenance à un groupe et de créer du lien social à travers sa consommation. L'idée de donner du sens à ses achats progresse », résume-t-il.
Un constat partagé par Philippe Moati, professeur d'économie à l'université Paris-Diderot, qui souligne le « côté très symbolique » de ce type de consommation : « dans un monde parfois vu comme dangereux ou compliqué, le consommateur cherche à se rassurer avec un produit dont il connaît l'origine, explique-t-il. Il suffit de voir le retour, dans les produits de consommation courante, des ''recettes à l'ancienne'', ''traditionnelles'', ''sans ceci et sans cela''. Un véritable changement de modèle de consommation est en cours ». 
Pour autant, ce nouveau modèle en construction ne se veut pas, à l'origine, plus solidaire, insiste M. Moati : « S'il y a une volonté émergente de donner du sens à ses achats, d'être plus attentifs à la qualité et à l'origine des produits, c'est d'abord parce que c'est bon pour soi. Et si cela bénéficie aussi aux autres, c'est tant mieux. »
« LE BUSINESS PREND LE PAS SUR LA VALEUR »
D'ailleurs, rappellent les deux experts, une des dernières tendances de consommation est la personnalisation, tournée vers soi. Coca-Cola ou Nutella, symboles de la consommation de masse, proposent désormais des étiquettes à votre nom. « Il y a un véritable besoin de sortir du standard, de se démarquer des autres », analyse M. Moati.
C'est sur cette idée du produit unique, ou presque, qu'Etsy a bâti son succès. En octobre, le site a décidé de changer ses conditions générales d'utilisation, et autorise désormais les vendeurs à employer du personnel, à utiliser des fabricants externes et à sous-traiter l'expédition des produits, afin que ces derniers puissent « faire grossir leur affaire » – l'un des objectifs du site, explique sur le blog de l'entreprise son patron Chad Dickerson.
« Ce n'est pas étonnant et pas forcément inquiétant. Au début, on table sur un concept très pur. Mais quand les affaires marchent, on prend quelques distances : le business prend le pas sur la valeur, on ajuste l'offre en fonction de la demande», souligne M. Moati.
Et de citer eBay, d'abord réservé aux particuliers avant de faire une place aux professionnels, ou encore les sites de covoiturage qui, dans un premier temps, mettaient l'accent sur le côté convivial du voyage et qui, désormais, mettent d'abord en avant le coût avantageux du trajet. Et tant pis si l'on déçoit, au passage, « les militants de la première heure, très attachés au modèle de départ ».
Pour les déçus adeptes du fait-main reste alors une solution : se mettre au « do it yourself »« devenu incontournable dans le monde de la consommation contemporaine », estime M. Donfu. Une étude d'Opinion Way, réalisée en juin 2013, révèle ainsi que près de deux tiers des Français s'y adonnent déjà.
Par Anna Villechenon

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