L'équipementier Acome porté par le décollage de la fibre en France.
La coopérative qui fabrique du câble en Normandie s'attend à une croissance de 40 % de son activité fibre en 2014.
C'est un rendez-vous immanquable pour la petite communauté des gens qui conçoivent, posent et commandent des câbles télécoms dans l'Hexagone. Tous les deux ans, la coopérative Acome, qui fond la fibre optiquedans son usine normande de Mortain, organise un symposium où l'on prend le pouls du déploiement du très haut débit tricolore. « Cette année, nous avons choisi d'aller en Russie, car c'est le marché qui a le plus grand potentiel en Europe pour la fibre optique jusqu'à l'habitant (FTTH) », explique Jacques de Heere, président de la société.
Les opérateurs russes ont su se montrer convaincants sur le plan commercial : il y a déjà 10 millions d'abonnés pour 30 millions de prises disponibles. Toutefois, l'enthousiasme des Russes doit beaucoup à la mauvaise qualité du réseau téléphonique classique. Et ces chiffres ne concernent que les grandes villes. « Avec des taux de pénétration FTTH proches de 40 % des foyers raccordés, Paris n'a rien à envier à Saint-Pétersbourg », décrypte Roland Montagne, de l'institut Idate.
La France locomotive du déploiement
La France est enfin devenue une locomotive du déploiement du très haut débit fixe, souligne Jacques de Heere : « Le travail technique, politique et réglementaire a été fait. Alors que nous avons été à la traîne par rapport aux pays du Nord, à l'Asie et à l'Amérique, nous avons maintenant le marché le plus dynamique d'Europe. »
Le dirigeant évoque également un « vent d'optimisme » : « Orange est bien parti et quelques autres opérateurs privés complètent. On voit se dessiner à l'horizon les déploiements massifs des collectivités territoriales », se réjouit-il. Résultat, l'usine de Mortain tourne à plein régime. La croissance de l'activité fibre optique d'Acome devrait atteindre 30 à 40 % cette année, contre 25 % l'an dernier.
L'usine tourne à plein régime
A Saint-Pétersbourg, Hervé Touzeau, d'Orange, a confirmé cette accélération, avec un rythme annualisé de plus de 1 million de prises installées. « Nous faisons 80 % de l'effort en zone de déploiements privés [correspondant à 57 % de la population, là où le peuplement est le plus dense], a-t-il affirmé. Notre seule limite est la capacité des sous-traitants et des fournisseurs de câbles à répondre à nos besoins. » Propos que l'on confirme chez un installateur de réseaux : « Nous commençons à prospecter en Asie car les délais de livraison sont en train de s'allonger, il ne va bientôt plus y avoir suffisamment de fibre produite en France. » Acome va investir 10 millions d'euros en deux ans dans la production de câble très haut débit pour assurer la montée en charge. Jacques de Heere, qui a connu de nombreux retournements de cycle, espère juste que le redécoupage des régions et, surtout, la fusion SFR-Numericable ne vont pas déstabiliser le plan très haut débit.
D'autant que, chez Acome, on attend ce moment depuis longtemps. « Pendant trente ans, nous avons investi dans la fibre optique sans y gagner d'argent, nous commençons juste à équilibrer les comptes », fait remarquer Jacques de Heere. Avec l'essor du très haut débit, le marché de la bonne vieille paire de cuivre commence à se rétracter. Mais cela n'est pas un vrai problème, poursuit-il : « En volume, la fibre permet de compenser le déclin, en valeur nous gagnons 4 à 5 %. C'est important, car nous allons pouvoir reconvertir le personnel qui travaille sur le cuivre, en le formant à la fibre. » Une sérénité dont pourrait s'inspirer l'opérateur historique, que tant de liens arriment au cuivre.
Par Solveig Godeluck
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