dimanche 29 décembre 2013

Lundi 30 décembre : La production de l'aquaculture va dépasser celle du bœuf

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La production de l'aquaculture va dépasser celle du bœuf

LE MONDE |  • Mis à jour le 
Une ferme de tilapia au Honduras. Le tilapia, la carpe, chanos, poisson-chat, saumon, anguille représentent 85 % de la production mondiale de poissons. | AFP/HO
Demain, aurons-nous du filet dans nos assiettes ? Oui, mais du filet de tilapia ou de panga, pas de bœuf. Car l'aquaculture est en train de rattraper la production de viande bovine (à un peu plus de 67 millions de tonnes chacune) et la tendance n'est pas près de s'inverser. Parce qu'ils reviennent cher, parce que leur consommation décroît dans les pays développés gagnés par le surpoids, steaks et rôtis stagnent tandis que la production de poissons de mer et d'eau douce, de crustacés et de coquillages progresse de 6 % par an depuis une vingtaine d'années et a quasiment été multipliée par deux depuis 2001.
Aujourd'hui, près d'un poisson sur deux consommé dans le monde n'a déjà plus rien de sauvage. Là encore, l'évolution paraît inéluctable : après avoir connu des sommets avec des technologies de plus en plus performantes jusque dans les années 1990, la pêche ne progresse plus car la ressource n'a plus le temps de se régénérer. L'Organisation des Nations unies pour l'agriculture (FAO) prédit un bel avenir à l'aquaculture qui a augmenté à un rythme supérieur à la croissance démographique mondiale ces cinquante dernières années. « Au cours des dix prochaines années, la production totale issue de l'aquaculture et des pêches dépassera celle de boeuf, de porc ou de volaille, » écrit Árni M. Mathiesen, sous-directeur général de la FAO, à condition d'« encourager une gestion plus avisée des écosystèmes ». Autrement dit de consentir à de gros efforts pour l'environnement.
« PLUS RENTABLE »
Pangas élevés à l'urine, saumons nourris au soja OGM, carpes farcies aux métaux lourds : la mauvaise réputation du secteur n'est pas toujours fondée, mais son développement fulgurant, l'arrivée d'espèces inconnues et les interrogations sur l'alimentation des poissons inquiètent le consommateur. Il paraît cependant déraisonnable d'imaginer s'en passer pour nourrir 10 milliards d'humains en 2050, selon Jean-François Baroiller, spécialiste de l'aquaculture au Centre de recherche agronomique pour le développement (Cirad). « Un poisson est au moins dix fois plus rentable qu'un bœuf par sa capacité à transformer l'alimentation qu'on lui donne », assure le scientifique.
Mais dès qu'ils sont entassés dans des bacs en ciments, des rizières ou des étangs d'estuaires, les poissons présentent les mêmes travers que n'importe quel élevage industriel animal. Ils deviennent vulnérables aux épidémies, rejettent des quantités d'azote qui suscitent eutrophisation, prolifération d'algues ou micro-algues toxiques. Les espèces domestiquées risquent en outre d'affaiblir leurs congénères sauvages.
« Il faut arrêter de se focaliser sur le principe de monoculture pour réfléchir à des écosystèmes, » insiste M. Baroiller, qui codirige une unité de recherche basée à Montpellier, travaillant sur l'intensification raisonnée et écologique de la pisciculture. L'équipe étudie les modes d'alimentation en pleine évolution. Jusqu'à quel point peut-on remplacer farines et huile de petits poissons-fourrage – une ressource qui devient rare et chère – par des céréales dans l'ordinaire des carnivores ? Quelle proportion d'algues les omnivores sont-ils prêts à ingurgiter ?
Six poissons (carpe, tilapia, chanos, poisson-chat, saumon, anguille) représentent à eux seuls 85 % de la production mondiale totale. Parce que leur cycle de vie est bien maîtrisé, ils sont en train de s'imposer partout au détriment d'espèces indigènes. Le tilapia est de ceux-là. Chair blanche, pas trop de goût ni d'arête, il s'en produit 4,3 millions de tonnes par an dans plus de 100 pays (principalement en Chine, suivie de l'Egypte, de l'Indonésie, du Brésil et des Philippines). Il est consommé partout.
Comment cet omnivore d'Afrique a-t-il conquis le monde en quelques années ? « Dans un petit sac avec de l'eau », répond malicieusement M. Baroiller. Les chercheurs du Cirad ont contribué à son succès, eux qui ont travaillé en Afrique dont le tilapia est originaire, jusqu'à ne produire que des mâles – plus dodus que les femelles – avant de le rendre plus résistant à la salinité dans des élevages philippins.

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