lundi 2 décembre 2013

Mardi 3 décembre : Musée en taule

http://abracadablog.over-blog.com/article-musee-en-taule-120793046.html

Musée en taule


Pour rendre l'art accessible aux "publics empêchés", la RMN a choisi de monter une exposition de toutes pièces au coeur d'un centre de détention. Une première accueillie par la prison de Réau, vaste bâtiment inauguré en 2011 et qui ne compte pas moins de 798 détenus. Tous y sont incarcérés pour de lourdes peines. Sur une vingtaine de détenus désireux de "saisir cette opportunité", dix, âgés de 22 à 50 ans, "les plus motivés" selon la directrice, ont été retenus. Pendant un an ils ont travaillé à l'élaboration d'une exposition en étroite collaboration avec Vincent Gille, chargé d'études documentaires, le scénographe Pascal Rodriguez et le philosophe carcéral Alain Guyard. Du choix des œuvres au cartels en passant par l'accrochage et la rédaction d'un petit journal, rien n'a été laissé au hasard et le résultat est plus que probant. Le thème choisi, "Le Voyage" à travers quatre continents, était une façon pour eux de "dépasser les murs", d'assouvir une "envie d'ailleurs" et de s'offrir "un regard différent sur le monde, symbole d'espoir".

Accessible uniquement à l'ensemble des détenus, à leurs familles ainsi qu'aux gardiens, l'exposition se visite en compagnie de ces commissaires, pas peu fiers de leur travail. Assoiffés d'apprendre, ils ont potassé des livres d'art pour comprendre ce qu'ils avaient devant les yeux et roder un discours de médiateur professionnel. Marc avoue "ne plus regarder les œuvres d'art de la même façon". Et il poursuit :"Avant, je ne cherchais pas à aller plus loin."  Un autre détenu reconnaît que "finalement l'art n'appartient pas qu'à une élite". Statuettes, photographies, toiles, dessins, objets de mesure, vieilles malles de voyage, viennent dumusée Guimet, du Quai Branly et du musée Picasso, entre autres. Autant d'institutions qui ont choisi de leur faire confiance pour prendre soin et valoriser une partie de leurs collections. 

bazar

Tous ont eu un rapport particulier avec la centaine d’œuvres sélectionnée par leur soin. Le Bazar des tapis dans le Khan-Khabil au Caire de Mouchot (voir ci-dessus), rappelle à l'un d'eux ses "parents et odeurs d’Algérie", Jean-Claude, un artiste qui possède un petit atelier dans l'enceinte de la prison, a eu, quant à lui, un coup de cœur pour une nkisi, statuette magique du Congo. Il a d'ailleurs créé une oeuvre originale pour introduire l'exposition, un masque en terre cuite au regard pénétrant surmonté d'un troisième œil, "l’œil qui voit tout".

Les détenus aimeraient ne pas en rester là et "renouveler cette expérience humaine" enrichissante. La directrice de la prison de Réau a donc invité l'ensemble des directeurs de centres pénitentiaires d'Ille-de-France à découvrir l'exposition fin octobre pour "créer un engouement et une continuité au projet". Et pourquoi pas, comme le souhaiterait le scénographe, la sortir de l'enceinte pour la présenter au grand public.

Laura Heurteloup pour Arts Magazine

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.