vendredi 29 août 2014

jeudi 28 août : Ils redonnent le goût d'apprendre aux décrocheurs

Ils redonnent le goût d'apprendre aux décrocheurs


Muriel Epstein n'en revient pas. Le succès de Transapi a pris de court cette prof de maths. Ce dispositif innovant d'aide à l'apprentissage à destination des plus de 16 ans qu'elle a co-fondé au printemps 2013, a déjà été expérimenté par une centaine de jeunes. « Nous sommes surveillés de près par le ministère de l'éducation nationale », plaisante-t-elle. Son association s'adresse aux « décrocheurs », ces jeunes en désamour avec l'école. « Mais qui, au fond d'eux, adorent apprendre », affirme-t-elle. Pour peu qu'on leur propose un enseignement moins traditionnel et un cadre moins rigide que la salle de classe.

Les « permanences » de Transapi se tiennent dans le centre des ressources de la Gaîté Lyrique, ancien théâtre du 3e arrondissement de Paris reconverti en 2011 en lieu consacré aux arts numériques. Des enseignants « passionnés » y accueillent les mardis et vendredis, de 15 heures à 18 heures, une quinzaine de jeunes en « errance ». La plupart sont quasi-déscolarisés. « Certains ne vont en cours qu'un jour par semaine », souligne Mme Epstein. Pourtant, ils éprouvent encore le besoin de s'instruire, ou du moins, de ne pas complètement décrocher, assure-t-elle. Or« peu de dispositifs existent pour ce type de profils », estime-t-elle. « Il faut parfois attendre jusqu'à trente mois avant que le jeune soit pris en charge par une association. Entre-temps, il ne fait rien de ses journées. »
« ALTERNATIVE AU VIDE »
La vocation de Transapi n'est pas de se substituer à l'école, « mais de proposer une alternative au vide, où les jeunes peuvent, dans un climat convivial, reprendre goût à l'apprentissage, et, pourquoi pas, retourner progressivement en classe ». Lors des permanences, qui ont lieu de septembre à juin, deux possibilités s'offrent à eux : étudier seul dans un coin de la salle mise à leur disposition ou demander l'aide d'un enseignant sur une notion scolaire. « Nous essayons de ne pas les brider », explique Mme Epstein. Elle leur prête également des tablettes tactiles, afin de leur apprendre à « gagner en autonomie ». Surtout pour ceux qui ne prendront plus le chemin de l'école.
Une démarche souple où chacun est libre de ses mouvements. « Dans une classe, il faut rester assis des heures sur une chaise, alors que là, chacun fait comme il le sent », s'enthousiasme Lucia, 15 ans, qui préfère taire son nom de famille. La jeune fille redouble sa seconde en septembre prochain. « Je suis déterminée à réussir mon année, dans l'optique de devenir un jour pédopsychiatre », explique-t-elle fièrement.
Pourtant, il y a moins d'un an, elle pensait ne plus jamais remettre les pieds en classe. « Je m'endormais en cours. Ca ne me servait à rien d'y aller », estime-t-elle. La jeune fille quitte progressivement l'école et passe ses journées sous la couette. Jusqu'au jour où elle apprend l'existence de l'association Transapi.
PASSER DU RÔLE D'ÉLÈVE À CELUI DE PROFESSEUR
C'est aux côtés des professeurs qui animent le dispositif que la jeune fille retrouve l'envie d'apprendre« Ils prennent soin de chaque personne », explique-t-elle. Ces derniers lui montré une méthode ludique pour retenir les notions du programme scolaire : une fois sa leçon apprise, la « raconter » face à la caméra de sa tablette, puis partager la séquence avec d'autres. Un peu comme si la jeune fille passait du rôle d'élève à celui de professeur qui s'adresse à une classe entière.
Désormais, Lucia a toujours recours à cette démarche. « Je vais en cours, et de retour à la maison, j'apprends comme ça mes leçons. C'est plus drôle que de réciter bêtement comme un mouton ». Si son passage par Transapi a été un succès, d'autres n'adhèrent pas au dispositif. « Beaucoup viennent une fois, puis on ne les revoit plus jamais », regrette toutefois Eléonore Le Bian-Minfin, 20 ans, bénévole de l'association. « Pour que le dispositif marche, il faut que le jeune ait, en premier lieu, envie de s'en sortir. »
Par Emma Paoli

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